Le conseil municipal du 13e arrondissement, à l’initiative de l’exécutif municipal, a émis le 1er février un vœu condamnant « le boycott d’Israël » et s’opposant « aux tentatives de l’isoler du concert des Nations ». Voilà que ce même vœu devrait, dit-on, être présenté à la prochaine réunion du Conseil de Paris et devenir LE message de Paris en soutien à Israël honteusement stigmatisé du fait des campagnes BDS.
Il s’appuie en premier lieu sur le fait que l’appel au boycott aurait été déclaré illégal par la cour de cassation avec ses arrêts du 20 octobre 2015. Ceci est inexact : la cour de cassation a statué, stricto sensu, sur le seul cas des arrêts de la cour d’appel de Colmar qu’elle a effectivement validés. D’autres jugements par contre ont relaxé les prévenus dans des affaires du même ordre et sont désormais définitifs.
C’est le cas de la quasi totalité des jugements de première instance qui ont relaxé les militants poursuivis. La cour d’Appel de Paris, elle-même, confirmant un jugement de première instance, soulignait le 24 mai 2012 que les faits en cause constituaient une « critique pacifique de la politique d’un État relevant du libre jeu du débat politique ».
Il est très surprenant, pour ne pas dire incohérent, de tenir l’appel au boycott comme illégal s’agissant d’Israël, alors qu’il aurait été de bonne pratique quand il s’appliquait à d’autres pays, Russie ou Mexique par exemple. Et alors que le boycott de l ‘Afrique du Sud de l’apartheid fait aujourd’hui figure d’action citoyenne emblématique et de haute portée morale.
Les élus de Paris doivent d’abord s’interroger sur le sens d’une telle initiative compte-tenu du contexte politique dans lequel elle intervient.
Le gouvernement au pouvoir aujourd’hui en Israël, le plus extrémiste de l’histoire et comportant des membres ouvertement racistes, se trouve effectivement isolé sur la scène internationale. Pour répondre à cet isolement, plutôt que de renoncer à sa politique de colonisation qui vise à ruiner la solution à deux États, il mobilise des moyens énormes pour s’en prendre à la campagne internationale pour le Boycott, le Désinvestissement, les Sanctions ainsi que le rapporte le journal Libération du 5 février.
Ce même gouvernement s’en prend avec brutalité aux ONG israéliennes qui documentent les violations des droits de l’homme et bénéficient d’aides étrangères, notamment venant l’UE, ainsi que le rapporte Le Monde du 5 février.
Adopter un vœu de la même teneur que celui du 13e arrondissement serait porter un coup à toutes celles et ceux qui, en Israël même, mènent un combat courageux face à un gouvernement décidé à faire taire toute voix discordante.
Ce serait cautionner le Premier ministre Netanyahou qui qualifie d’antisémite la décision européenne de procéder à un étiquetage différencié pour les produits issus des colonies israéliennes de Cisjordanie et du Golan.
Ce serait le cautionner encore quand il reproche à Ban Ki-moon d’encourager le terrorisme parce qu’il avait osé qualifier la poursuite de la colonisation d’affront fait à la population palestinienne et à la communauté internationale.
Adopter un tel vœu en Conseil de Paris serait une injure pour les nombreux militants qui, à travers le monde et spécialement dans notre pays, expriment leur solidarité avec le peuple palestinien en demandant le respect du droit international et qui, en l’absence de sanctions de la part des États, utilisent le seul moyen dont ils disposent : le boycott citoyen.
Les conseillers de Paris ont aujourd’hui toutes les cartes en mains.
Là où Paris est attendue pour soutenir la société civile palestinienne, pour dénoncer le blocus de Gaza, et l’expansion de la colonisation, nous voulons croire que ses élus ne se laisseront pas entrainer sur le terrain aujourd’hui choisi par le Premier ministre israélien, celui du rejet du droit et du mépris de la communauté internationale, celui de la loi de la jungle.
Taoufiq Tahani
Président de l’AFPS (Association France Palestine Solidarité)
Source : https://blogs.mediapart.fr/afps-ass...
Campagne en cours