Plateforme des ONG Françaises pour la Palestine

Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy - condition de la France à la création d’un État palestinien

5 octobre 2011

Monsieur le Président de la République

Palais de l’Elysée

55, rue du faubourg Saint-Honoré

75008 Paris

À Paris, le 5 octobre 2011

Monsieur le Président,

L’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-France), Amnesty International, la Ligue des droits de l’Homme et la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine souhaitent vous faire part de leur désapprobation des termes du compromis proposé par la France au président palestinien Mahmoud Abbas, concernant le soutien de l’Union européenne à la demande de reconnaissance d’un État palestinien par l’organisation des Nations unies.

Nos organisations saluent les efforts fournis par la France pour faire avancer les négociations internationales sur la reconnaissance d’un Etat palestinien comme membre ou observateur de l’ONU.

Cependant, nous réprouvons fermement l’une des conditions posées par la France à son soutien à l’initiative palestinienne et qui consiste à exiger du futur État palestinien qu’il s’engage à ne pas saisir la Cour pénale internationale.

Le 23 septembre 2011, le porte-parole du Quai d’Orsay, interrogé sur les raisons qui ont amené la France à poser une telle exigence, a répondu en citant le passage suivant, extrait du discours que vous avez prononcé devant l’Assemblée générale des Nations unies : les Palestiniens « devraient s’engager à ne pas utiliser ce nouveau statut pour recourir à des actions incompatibles avec la poursuite des négociations. »

La demande faite aux Palestiniens de s’abstenir de saisir la Cour pénale internationale nous semble condamnable à plusieurs égards.

Tout d’abord, nous désapprouvons le postulat qui consiste à faire prévaloir les négociations sur la recherche de justice et à considérer que la lutte contre l’impunité peut entraver le processus de paix. Nous estimons en effet qu’il ne saurait y avoir de paix durable sans justice.

De plus, l’opposition de la France au recours à la justice pénale internationale dans le conflit israélo-palestinien affaiblit considérablement l’autorité de la Cour que la France a pourtant œuvré à créer et qu’elle s’est engagé à soutenir en ratifiant le Statut de Rome.

Cette posture de la France contraste par ailleurs avec l’engagement pris par le gouvernement français de consolider la place allouée aux droits de l’homme dans sa diplomatie, engagement pourtant renouvelé depuis le début du Printemps arabe.

Enfin, la condition posée par la France à la reconnaissance du futur État palestinien est hautement préjudiciable aux victimes, aussi bien palestiniennes qu’israéliennes, dont la plupart n’ont jamais obtenu justice pour les préjudices qu’elles ont subis ou continuent de subir. L’absence quasi-totale de sanction des auteurs israéliens et palestiniens des crimes perpétrés dans le cadre de l’opération Plomb durci est particulièrement révélatrice du climat d’impunité qui prédomine sur le territoire israélo-palestinien. Les rapports rendus les 21 septembre 2010 et 18 mars 2011 par le Comité d’experts indépendants, créé dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations du rapport Goldstone, ont établi que ni le gouvernement israélien, ni la partie palestinienne n’ont satisfait aux demandes formulées par l’Assemblée générale des Nations unies d’enquêter sur les crimes commis dans le cadre de l’opération Plomb durci.

Il en va de même des nombreuses atteintes aux droits de l’homme commises avant et après l’opération Plomb durci.

C’est pourquoi nos organisations insistent sur l’impérieuse nécessité de porter cette affaire devant la Cour pénale internationale qui apparaît aujourd’hui comme la seule instance à même de rendre justice aux victimes.

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à réaffirmer l’attachement de la France au respect des engagements internationaux qu’elle a souscrits en matière de droits de l’homme et notamment au Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale. Ce faisant, nous vous demandons de renoncer à conditionner le soutien de la France à la création d’un État palestinien à l’engagement de ce dernier à ne pas saisir la Cour pénale internationale.

Vous remerciant de l’attention que vous prêterez à notre courrier, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.

Vous remerciant de l’attention que vous prêterez à notre courrier, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.

  • François Walter, Président de l’ACAT France
  • Geneviève Garrigos, Présidente d’Amnesty International- France
  • Pierre Tartakowsky, Président de la Ligue des droits de l’Homme
  • Bernard Ravenel, Président de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine

Documents à télécharger - Télécharger la lettre
Partager / imprimer
Bouton Facebook Bouton Twitter Bouton PDF Bouton imprimer

Rechercher par thématique
Nations unies


Articles associés

30 mai 2024
Rafah, blocus étudiants et écocide
Analyses politiques et géopolitiques Colonisation Eau Bande de Gaza Politique française Jérusalem Autorité palestinienne Positions officielles de la France Nations unies Torture et mauvais traitements Universités Agriculture Etat de Palestine Droit international Solidarité internationale Enfance/jeunesse Histoire/analyse politique Culture / art Réfugiés palestiniens Destructions Aide internationale La question palestinienne en France Occupation/annexion Diplomatie Hamas Société civile Transferts forcés Crime de guerre UE/Palestine Société française Liberté d’expression Armement Violence des colons Cour Pénale Internationale Criminalisation Impunité Climat/environnement Apartheid
18 avril 2024
Hôpital Al-Shifa, ventes militaires françaises et demande de cessez-le-feu
Analyses politiques et géopolitiques Colonisation Eau Bande de Gaza Développement UE/Israël Politique française Jérusalem Autorité palestinienne Nations unies Torture et mauvais traitements Agriculture Etat de Palestine Droit international Solidarité internationale Enfance/jeunesse Histoire/analyse politique Santé Prisonniers palestiniens Vallée du Jourdain Destructions Aide internationale La question palestinienne en France Société (Palestine/Israël) Occupation/annexion Hamas Société civile Crime de guerre UE/Palestine Liberté d’expression Armement Violence des colons Climat/environnement Apartheid Guerre
19 juillet 2023
Les organisations de défense des droits de l’homme se félicitent de la publication de la mise à jour de la base de données de l’ONU des entreprises liées à la colonisation et appellent à une mise en œuvre complète et annuelle de son mandat
Entreprises et droits humains Nations unies

Campagne en cours


L’agenda

Dernières publications

23 juillet 2024 La CIJ estime que l’occupation du territoire palestinien par Israël est illégale Occupation/annexion

17 juin 2024 Ensemble, contre l’extrême droite

31 mai 2024 Européennes : quels engagements des candidats pour la Palestine ? La question palestinienne en France UE/Palestine


> Toutes les publications