Paris, le 10 septembre 2020
Monsieur le Ministre,
Dans une lettre remise le 3 septembre 2020, le ministre de la Justice israélien Aryeh Deri a annoncé son intention de révoquer la résidence permanente à Jérusalem de l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, sans base légale sérieuse.
Le ministre invoque, en effet, les affaires judiciaires passées de M. Hamouri, qui a purgé sa peine depuis déjà plusieurs années en Israël en tant que prisonnier politique, pour des faits supposés mais jamais prouvés. Il invoque également la « loi sur l’entrée en Israël de 1952 » qui régule les visas et permis de résidence en Israël.
Alors que le ministre évoque la résidence de Salah Hamouri « en Israël », il est nécessaire de rappeler que M. Hamouri est un résident de Jérusalem-Est (où il est né), territoire palestinien occupé. Il est ainsi soumis au système de permis de résidence discriminatoire mis en place par les autorités israéliennes et réservé aux Palestiniens de Jérusalem en toute violation du droit international. Lui retirer son permis aurait pour conséquence son expulsion définitive de son lieu naissance et de résidence, Jérusalem.
En effet, les Palestiniens de Jérusalem sont considérés comme des résidents sur leur propre terre et sont même poussés à quitter la ville – qu’Israël considère comme sa capitale « une et indivisible » au mépris des résolutions des Nations unies – par une politique insidieuse de transferts forcés liée au système de permis de résidence notamment. Ces permis peuvent être révoqués de manière arbitraire, en violation totale du droit international. Depuis 1967, Israël a ainsi expulsé plus de 14 500 Palestiniens de Jérusalem, un crime selon le Statut de Rome (1) et la IVe Convention de Genève (2).
En outre, Salah Hamouri est, depuis de nombreuses années, la cible des autorités israéliennes qui l’ont détenu arbitrairement à plusieurs reprises (il a passé plus d’un an en détention administrative en 2017-2018). Elles ont également empêché sa femme et son fils de vivre avec lui en leur interdisant l’entrée en Israël. Cet acharnement, qui s’explique en partie par les activités de défense des droits des prisonniers menées par M. Hamouri, doit cesser.
Le 6 septembre 2020, l’ambassadeur de France en Israël a demandé au ministère des Affaires étrangères israélien de surseoir à l’expulsion de M. Hamouri et à ce que sa famille puisse vivre à ses côtés à Jérusalem. Nous félicitons le gouvernement français pour son action rapide auprès des autorités israéliennes. Malgré un retour négatif des autorités israéliennes, nous appelons la France à maintenir sa position et continuer d’interpeller les autorités israéliennes afin :
– D’empêcher l’expulsion de Salah Hamouri qui pourrait intervenir dès début octobre 2020 ;
– Que le gouvernement israélien cesse tout harcèlement systématique et arbitraire envers ce citoyen franco-palestinien dont les libertés fondamentales (de circulation, d’expression, de droit à retourner dans son pays de naissance) doivent être protégées ;
– De condamner les politiques israéliennes de transferts forcés des Palestiniens, y compris celles permises par le système de permis de résidence discriminatoire mis en place par Israël, notamment par la « loi sur l’entrée en Israël de 1952 ».
En espérant que ces demandes retiendront toute votre attention, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’assurance de notre haute considération.
M. François Leroux, Président de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
(1) Un crime contre l’humanité selon l’article 7 du Statut de Rome qui institue la Cour pénale internationale.
(2) Article 49.
Cette lettre a également été envoyée au Président de la République. Voir sa réponse.
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