Paris, le 4 décembre 2015
Objet : destructions illégales de structures à Al Hadidiya (vallée du Jourdain)
Monsieur le Ministre des Affaires étrangères,
Nous sommes extrêmement préoccupés par la démolition punitive de 14 structures du village d’Al Hadidiya dans la vallée du Jourdain, menée le 26 novembre 2015, et par le fait que les autorités israéliennes continuent depuis ce jour de détruire et confisquer les abris de cette communauté dont les membres vivent actuellement dans le froid et sous la pluie. Nous appelons à une action urgente et concrète.
Le jeudi 26 novembre, à 7h30 du matin, l’armée israélienne est entrée dans la communauté d’Al Hadidiya pour une nouvelle vague de démolitions. L’opération punitive visait la famille du défenseur des droits de l’homme et chef de la communauté Abu Saqer. Elle constitue clairement des représailles à l’initiative prise par les habitants d’aménager un chemin de terre qui lie le village au reste de la région, avant que les pluies d’hiver arrivent. La fille d’Abu Saqer, enceinte, a été agressée par les soldats et a été emmenée à l’hôpital ; elle risque de perdre son enfant.
La démolition s’est produite alors même que la communauté avait fait appel de l’ordre de démolition devant un tribunal israélien. Cet appel est toujours en attente de jugement, et pendant ce temps tout ordre est censé être suspendu. La communauté d’Al Hadidiya a été ciblée à de multiples reprises par les démolitions, le refus d’accès à l’eau et aux infrastructures, ainsi que par des entraînements militaires dans la région.
Le lendemain des démolitions, les habitants ont commencé à reconstruire leurs maisons et les abris pour les animaux, mais le jour d’après, l’armée est venue les détruire à nouveau. Le 28 novembre, le Croissant Rouge a apporté des abris pour les animaux et deux tentes pour les familles, confisqués dès le lendemain par l’armée.
La nuit, les habitants ont dû dormir par terre, dans les champs et sous la pluie, utilisant des bâches en plastique pour se couvrir, et le peu de biens qu’ils avaient pu sauver des destructions. Le 30 novembre, vers 9 heures du matin, l’armée israélienne est revenue une fois de plus pour déchirer les bâches. Les habitants n’avaient pas été autorisés à utiliser des bâches en plastique.
Al Hadidiya est l’une des communautés visées par le plan de « réinstallation » des communautés vivant en Zone C, en particulier les communautés bédouines de la vallée du Jourdain, de la zone dite « E1 », et des collines du Sud d’Hébron. Les politiques israéliennes envers ces communautés ont été considérées par les Nations unies et l’Union européenne comme équivalant à un transfert forcé de populations, ce qui constitue un crime de guerre selon la Quatrième Convention de Genève et un crime contre l’humanité selon le Statut de Rome. La France, en tant qu’Etat partie, a l’obligation de prendre des mesures efficaces pour mettre fin à ces violations graves du droit international.
Quelques semaines seulement après que l’UE a publié sa notice sur l’étiquetage des produits des colonies, Israël semble déterminé à continuer sa politique de transfert forcé, au bénéfice de son projet illégal de colonisation. Nous vous demandons ainsi, Monsieur le Ministre, de :
• demander instamment la présence d’observateurs et de personnel diplomatique dans les communautés visées par des démolitions illégales et déplacements forcés ;
• rejeter publiquement ces politiques et demander leur fin immédiate ;
• décider de l’interdiction de tous les produits provenant des colonies israéliennes.
En vous remerciant d’avance pour l’attention que vous accorderez à notre courrier, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre plus haute considération.
Claude Léostic
Présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Lire aussi le courrier envoyé à Federica Mogherini :
Et la réponse des chefs de mission de l’UE :
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