Plateforme des ONG Françaises pour la Palestine

Adoption d’une résolution approuvant la définition de l’antisémitisme de l’IHRA en France : un recul désastreux pour les libertés publiques et la lutte antiraciste

3 décembre 2019

Aujourd’hui, une majorité de 154 député·e·s français·e·s ont adopté la résolution n°2403 visant à lutter contre l’antisémitisme proposée par Sylvain Maillard, malgré les nombreuses objections et mises en garde de la société civile.

La résolution adopte la « définition opérationnelle utilisée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste » (IHRA). Or, depuis 2017, la CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’Homme), rapporteur national indépendant sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, s’oppose à cette définition qui vise « à amalgamer à du racisme la critique légitime d’un Etat et de sa politique, droit fondamental en démocratie » (voir aussi sa lettre envoyée le 26 novembre aux député·e·s). Des organisations anti-racistes telles que SOS racisme et la Ligue des droits de l’Homme ont également dénoncé la définition, exprimant des dangers pour la liberté d’expression et la lutte antiraciste. L’opposition est globale puisqu’elle existe au niveau européen mais aussi international. 40 organisations juives dans le monde ont publié, en 2018, un appel contre la définition de l’IHRA qu’elles considèrent conçue pour délégitimer les défenseur·e·s des droits des Palestinien·ne·s.

Enfin, le 2 décembre 2019, 127 universitaires juifs ont appelé les député·e·s français·e·s à rejeter la résolution Maillard dans une tribune publiée dans Le Monde, parce qu’elle adopte la définition de l’IHRA et qu’elle associe l’antisionisme à l’antisémitisme.

« Nous déplorons une telle instrumentalisation de l’antisémitisme au bénéfice d’un Etat tiers qui viole systématiquement les droits de l’Homme et le droit international et ce en toute impunité », déclare le Président de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine François Leroux. « Au lieu de s’engager dans une lutte antiraciste universelle, les député·e·s qui ont soutenu cette résolution restreignent notre espace d’expression et d’action et cautionnent des organisations d’influence dont l’objectif premier n’est pas la lutte contre l’antisémitisme mais la délégitimation toute critique des politiques israéliennes ».

En effet, dans la promotion de sa résolution, Sylvain Maillard s’est entouré d’organisations proches du gouvernement israélien telles que ELNET (qui se veut être l’AIPAC européen) ou encore le Conseil régional de Judée et Samarie, organisation de colons israéliens extrémistes.

Les ONG françaises sont extrêmement inquiètes quant à leurs libertés d’expression et d‘action futures. Un simple coup d’œil chez les voisins européens qui ont adopté la définition de l’IHRA est à ce titre édifiant. Au Royaume-Uni par exemple, la définition a été utilisée à de nombreuses reprises pour réprimer ou censurer des événements de solidarité avec la Palestine, des étudiants et universitaires. Elle est devenue un instrument de propagande pour le gouvernement israélien face à toute critique ou mesure qui le dérange. Plus récemment, celui-ci a estimé que la politique européenne de différenciation - en particulier l’étiquetage des produits des colonies confirmé par une décision de la Cour de justice de l’UE le 12 novembre 2019 - était discriminatoire, sur les bases de la définition de l’IHRA (voir d’autres exemples ici).

Face à ces attaques, nos organisations continueront de défendre les droits des Palestinien·ne·s sur les bases du droit international et des droits de l’Homme comme elles le font depuis des décennies. Elles appellent les institutions françaises à prendre leurs distances avec la définition de l’IHRA, à défendre les libertés publiques et à s’engager dans une lutte sincère contre toutes les formes de racisme, y compris l’antisémitisme, en prenant appui sur les recommandations de SOS Racisme ou encore de la CNCDH.



Partager / imprimer
Bouton Facebook Bouton Twitter Bouton PDF Bouton imprimer

Rechercher par thématique
Politique française Liberté d’expression Criminalisation

Rechercher par type de ressources
communiqué


Articles associés

21 octobre 2024
[Edition spéciale] Gaza, une guerre de l’information
Analyses politiques et géopolitiques Promotion de la paix et de la non violence La question palestinienne en France Entreprises et droits humains Cour Pénale Internationale Solidarité internationale Défenseur.e des droits de l’Homme Torture et mauvais traitements Histoire/analyse politique Economie et développement Détention administrative Prisonniers palestiniens Positions officielles de la France Aide internationale Liberté d’expression Diplomatie Impunité Crime de guerre Colonisation Bande de Gaza Commerce solidaire Hamas Droit international Apartheid Médias Journalisme
8 octobre 2024
En Palestine et au Liban, Israël sème la désolation
La question palestinienne en France Promotion de la paix et de la non violence Analyses politiques et géopolitiques Entreprises et droits humains Société (Palestine/Israël) Solidarité internationale Défenseur.e des droits de l’Homme Histoire/analyse politique Cour Pénale Internationale Torture et mauvais traitements Santé UE/Israël Guerre Hamas Economie UE/Palestine Diplomatie Apartheid Bande de Gaza Colonisation Etat de Palestine Crime de guerre Criminalisation Droit international Occupation/annexion Violence des colons Politique française Aide internationale Réfugiés palestiniens
19 août 2024
« Violence génocidaire » et complicité européenne
Analyses politiques et géopolitiques La question palestinienne en France Torture et mauvais traitements Entreprises et droits humains Histoire/analyse politique Economie et développement Cour Pénale Internationale Société (Palestine/Israël) Aide internationale Droit international Liberté d’expression

Campagne en cours


L’agenda

Dernières publications

11 décembre 2024 Rapport Amnesty International « On a l’impression d’être des sous-humains » - Le génocide des Palestiniens et Palestiniennes commis par Israël à Gaza »

10 décembre 2024 Déclaration : Tous les États parties au Statut de Rome doivent coopérer pleinement avec la CPI dans l’exécution des mandats d’arrêt Cour Pénale Internationale Impunité Société (Palestine/Israël) Bande de Gaza Crime de guerre Guerre

10 décembre 2024 Communiqué - Émission des mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) Cour Pénale Internationale Impunité Société (Palestine/Israël)


> Toutes les publications