Israël exporte des armes aux gouvernements les plus répressifs du monde. Un nouveau projet vise à mettre en évidence sa responsabilité en repérant des ventes confidentielles.
Ces dernières décennies Israël est supposé avoir vendu des armes à environ 130 pays. Mais, quand on creuse un peu, il est impossible de trouver une liste complète de ces pays. Sauf des rapports au Registre des Nations unies sur les Armes conventionnelles (the United Nations Register of Conventional Arms), Israël ne fournit aucune information officielle sur ses exportations d’armes.
Israël a de bonnes raisons de vouloir cacher ces ventes car sa clientèle comprend certains des dictateurs mondiaux les plus tyranniques et des tortionnaires. Parmi eux, l’Afrique du Sud de l’apartheid, la junte militaire en Argentine, l’armée serbe pendant le génocide en Bosnie, et le Rwanda pendant les années précédant le génocide dans le pays.
Plus récemment, Israël a vendu des armes au Sud-Soudanet à la junte militaire au Myanmar. Des pays comme le Maroc, le Mexique, l’Arabie saoudite et d’autres encore, ont commencé à utiliser du matériel espion israélien contre les journaliste et leurs oppositions politiques. Certains de ces gouvernements ont commis ce qui équivaut à des crimes de guerre, et le droit international considère qu’il est illégal de soutenir ces crimes.
Les clients d’Israël aimeraient bien que cela ne soit pas rendu public. C’est pourquoi les annonces qu’Israël a vendu un nouveau missile ou un système d’espionnage mentionnent souvent « un pays de la zone Asie-Pacifique » ou « un pays européen », afin de maintenir la confidentialité du client. Celle-ci se transforme alors en une absence de responsabilité, à la fois interne et extérieure, pour ces gouvernements et leurs achats militaires.
Israël refuse de communiquer lui-même les données. Le gouvernement travaille dans un cadre légal confortable qui n’exige ni transparence ni surveillance extérieure tandis que les compagnies impliquées ont un intérêt économique à maintenir la confidentialité de leurs clients. Tout cela fait qu’il est pratiquement impossible de savoir exactement ce que vend Israël. Et pourtant c’est une information qui reste vitale.
Ces données sont cruciales pour les militants en Israël qui depuis des années exigent – et ont parfois obtenu- l’arrêt des ventes d’armes israéliennes à des pays coupables de graves violations des droits humains. Mais ces campagnes sont impossibles sans la capacité de repérer quelles sont les ventes d’armes actuellement.
Pour essayer de révéler cette information au public, le Comité caritatif de Secours des Quakers aux Etats-Unis (U.S. Quaker nonprofit American Friends Service Committee) a lancé le DIMSE, la base de données des exportations militaires et sécuritaires israéliennes. L’an passé nous avons recueilli des informations disponibles pour le public sur les exportations militaires et sécuritaires israéliennes depuis vingt ans. En utilisant des rapports d’importation, des publications de compagnies exportatrices, des rapports journalistiques et autres, nous avons pu rassembler des informations, non seulement sur les ventes elles-mêmes mais aussi sur les relations militaires et politiques entre Israël et les divers pays acheteurs, ainsi que des informations sur la situation des droits humains dans ces pays et sur l’utilisation d’armes israéliennes pour commettre ces violations des droits humains.
Ce type d’information est vital pour les militants dans des endroits comme le Mexique où le logiciel espion israélien Pégase a été utilisé contre des journalistes et des militants des droits humains. De plus, cette information est vitale pour les militants de la solidarité avec la Palestine qui exigent un embargo sur les ventes d’armes avec Israël afin de parvenir à la fin de l’occupation.
C’est une demande particulièrement importante quand on sait que les opérations militaires à Gaza et en Cisjordanie servent de laboratoire aux firmes d’armement israéliennes qui peuvent y développer et tester leurs armes qu’elles vendent ensuite comme « testées au combat ».
La base de données permet aux utilisateurs une recherche par pays, produits (systèmes militaires et sécuritaires) ou selon les principales firmes militaires israéliennes. Actuellement la base de donnée comporte des informations sur près de 50 pays, 30 systèmes militaires et 11 firmes. Elle sera constamment mise à jour.
Elle n’est pas exhaustive et, à cause du secret inflexible du marché des armes, elle ne le sera probablement jamais. Peut-être qu’un jour nous pourrons comprendre, avec certitude et complètement, à quel point Israël est complice de violations des droits humains dans le monde. Mais pour le moment ce que nous pouvons faire c’est en découvrir le plus possible sur les exportations d’armes israéliennes, c’est le faire savoir quand c’est possible et nous joindre aux militants qui partout dans le monde se battent contre la militarisation et les violations des droits humains.
Sahar Vardi est une militante israélienne contre l’occupation. Elle a contribué à la création de Hamushim, un projet qui conteste l’industrie militaire et le commerce des armes d’Israël.
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