Originaire de Rafah dans le sud de la bande de Gaza, Mahmoud Sarsak rêvait depuis l’enfance de devenir footballeur professionnel. Encore adolescent, il joue pour la sélection nationale, attirant l’intérêt des recruteurs, dont ceux du club de Balata, dans le nord de la Cisjordanie, qui l’engage.
Mais son transfert s’arrêtera le 22 juillet 2009 au terminal d’Erez, entre la bande de Gaza et Israël, où il est détenu par les forces israéliennes en tant que « combattant ennemi ».
« Nous avons été surpris d’apprendre qu’il avait été arrêté à Erez, alors qu’Israël lui avait accordé une autorisation de passage de Gaza vers la Cisjordanie », déclare à l’AFP Mouzaffar Dhouqan, un responsable du club du camp de réfugiés de Balata, assurant avoir « suivi toutes les procédures requises » par l’administration militaire israélienne.
Depuis juillet 2009, Sarsak est en prison.
Mahmoud Sarsak, qui s’est joint le 23 mars à la grève de la faim de quelque 1.600 à 2.000 détenus palestiniens d’Israël, a repris son action malgré l’arrêt de ce mouvement collectif après un accord le 14 mai avec l’administration pénitentiaire. Il réclame l’engagement écrit que sa détention ne sera plus renouvelée et d’être relâché en juillet.
Son avocat Mohammad Jabbarine a indiqué à l’AFP que « le service de sécurité israélien allait examiner jeudi son dossier secret, conformément à une décision de la Cour suprême ». « S’il n’y a pas de preuve supplémentaire que M. Sarsak représente un danger pour Israël, il devra être libéré », a-t-il ajouté.
Le ministre palestinien des Prisonniers, Issa Qaraqaë, a déclaré à l’AFP que le détenu avait recommencé à boire du lait « selon un accord avec l’administration pénitentiaire israélienne, en échange de l’examen de sa demande de libération début juillet ».
La détention administrative, une disposition controversée, autorise l’incarcération pour des périodes de six mois renouvelables indéfiniment, sans inculpation ni jugement, permettant à Israël de maintenir secrets les dossiers des suspects pour protéger son réseau d’informateurs palestiniens.
Manifestant devant le QG du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Gaza, la mère de Mahmoud Sarsak, Oum al-Abed, accuse les Israéliens de « vouloir tuer Mahmoud. Pourquoi le monde reste-t-il silencieux ? ».
« Nous appelons les clubs arabes et européens à sauver la vie d’un footballeur », renchérit le frère, Imad. « Nous ignorons pourquoi il est détenu. Il n’a rien à voir avec la politique ».
A Rafah, une grande photo du détenu est accrochée à un mur de son ancien club. « Nous demandons aux clubs de football à travers le monde d’exprimer leur solidarité avec Mahmoud », déclare Jamal Abou Amira, président du comité sportif local.
De fait, son sort a suscité l’émotion dans le monde entier. Le président de la Fédération internationale de football (Fifa) Joseph Blatter a exhorté mardi la Fédération israélienne (IFA) à intervenir en faveur de joueurs palestiniens « détenus de manière prétendument illégale », citant Mahmoud Sarsak.
L’ancienne star du club anglais de Manchester United, Eric Cantona, s’est joint mardi à la campagne en faveur de la libération de Mahmoud Sarsak. Dans une lettre adressée au ministre britannique des Sports, Hugh Robertson, et au président de l’Union européenne des associations de football (UEFA), Michel Platini, le Français estime qu’Israël doit être soumis au même examen scrupuleux qu’avaient subi les pays hôtes de l’Euro 2012, la Pologne et l’Ukraine.
« Il est temps de mettre fin à l’impunité d’Israël et d’insister sur les mêmes critères d’égalité, de justice et de respect de la législation internationale que nous exigeons des autres états », indique la lettre également signée par l’intellectuel américain Noam Chomsky et le réalisateur de cinéma britannique Ken Loach.
Le 5 juin, à Paris, une trentaine de militants se sont enchaînés dans les locaux de la Fédération française de football (FFF) pour demander sa libération.
La Ligue des droits de l’Homme (LDH) et Amnesty international, entre autres, ont aussi exhorté Israël à le libérer.
Depuis fin mai, Mahmoud Sarsak absorbe du glucose et des vitamines. Mais sa famille, qui n’a jamais pu lui rendre visite, craint le pire.
Comme le résume son père, Kamal, 70 ans, récemment victime d’une crise cardiaque, qui redoute de ne pas pouvoir jouer encore longtemps les prolongations : « Je veux le voir avant de mourir ».
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