C’est peu de dire que la direction d’Europe Ecologie-Les Verts a moyennement apprécié l’initiative de ses parlementaires d’accepter l’invitation d’une ONG pro-israélienne de participer à un voyage de quatre jours dans l’Etat hébreu et en Palestine. Le tout sans lui en avoir soufflé mot.
Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au Sénat, et son homologue de l’Assemblée nationale, François de Rugy, ainsi que plusieurs autres parlementaires, se sont envolés, jeudi 6 juin, afin de rencontrer des dirigeants politiques, chercheurs ou associatifs. Côté israélien, les élus devraient s’entretenir avec le président Shimon Pérès, le porte-parole du premier ministre Benyamin Nétanyahou ou encore le ministre de l’environnement. Côté palestinien, les ministres des affaires étrangères, de la culture et des affaires religieuses devraient également les recevoir.
Le voyage est organisé à l’initiative d’Elnet, une ONG française qui oeuvre au rapprochement entre Israël et l’Europe. « Il est naturel de discuter avec des Etats avec lesquels la France entretient de bonnes relations », expliquait avant son départ M. Placé.
« RÔLE NORMAL DES PARLEMENTAIRES »
Sur le fond, Pascal Durand, le secrétaire national d’EELV qui se définit comme « un militant de la cause palestinienne et de la paix », n’y trouve rien à redire. Sur la forme, c’est une autre histoire : « Oui, aller en Israël et en Palestine fait partie du rôle normal des parlementaires, mais c’est mieux quand ils organisent eux-mêmes le voyage. Il faut faire doublement attention dans cette région-là à n’offenser personne et à la symbolique que l’on envoie ».
Jeudi, le numéro un écologiste s’est fendu d’une lettre en interne dans laquelle il fait part de sa décision de contacter les différentes associations qui composent la plate-forme pour la Palestine afin de leur confirmer que « le mouvement n’est pas à l’origine de ce déplacement ». David Cormand, membre de la direction et proche de M. Placé, a décidé de renoncer au voyage pour « ne pas donner l’impression de bafouer les positions » de la commission internationale d’EELV.
« Le parti ne cautionne pas ce déplacement », assure de son côté le porte-parole d’EELV, Jean-Philippe Magnen, qui ne décolère pas. « Ça ne peut pas être équilibré : il y a d’un côté les agresseurs et de l’autre les agressés. » Fin 2012, les écologistes avaient salué comme un « jour historique » l’accession de la Palestine au rang d’Etat non-membre de l’ONU et avaient dénoncé « le bilan accablant » du gouvernement Nétanyahou lors de sa visite en France fin octobre 2012.
FINANCEMENT
Leurs relations ne sont pas très bonnes avec le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF). En 2003, Roger Cukierman, alors président de l’institution – réélu fin mai à ce poste –, avait déclenché une polémique en dénonçant une « alliance brun-vert-rouge », accusant dans un même mouvement l’extrême droite, l’extrême gauche et les Verts d’antisémitisme et d’antisionisme. Depuis, seul M. Placé avait été invité cette année au dîner du CRIF.
Devant le tollé provoqué, ce dernier s’est senti obligé de faire amende honorable dans une lettre diffusée jeudi en interne. « Une information en amont aurait pu davantage être faite », reconnaît-il. Le sénateur de l’Essonne précise également que les frais du séjour sont à la charge des participants. A l’origine, c’était pourtant bien Elnet qui finançait la quasi-intégralité du déplacement. L’association ne demandait qu’une participation de 300 euros, mais les parlementaires étaient invités à donner plus s’ils le souhaitaient. La publicité faite autour du voyage aura eu raison de leurs dernières réticences financières.
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