Abdul Razeq Farraj, Palestinien détenu sans inculpation, mène une grève de la faim et sa santé, comme celle d’une centaine d’individus en détention administrative eux aussi en grève de la faim, se détériore rapidement.
Les autorités israéliennes les punissent pour leur mouvement de protestation et refusent de les laisser contacter leurs avocats et leurs familles, et consulter les médecins de leur choix.
Abdul Razeq Farraj a été arrêté le 25 février 2014 vers 2 heures du matin à son domicile à Ramallah, dans les territoires palestiniens occupés (TPO). Sans être interrogé, il a été condamné le lendemain à six mois de détention administrative, sur ordre d’un commandant de l’armée. Cette sentence prendra fin le 24 août prochain. Un juge militaire a confirmé cet ordre le 4 mars sur la base d’« informations secrètes » auxquelles Abdul Razeq Farraj ou ses avocats n’ont pas eu accès. Abdul Razeq Farraj a déposé un recours contre son placement en détention administrative, qui a été soumis à un tribunal militaire le 20 mai et rejeté six jours plus tard. Le 29 mai, ses avocats ont déposé une requête auprès de la Cour suprême. Ils attendent toujours sa décision.
Le 30 avril, Abdul Razeq Farraj a rejoint le mouvement de grève de la faim lancé six jours plus tôt par 125 détenus pour appeler Israël à mettre un terme à la détention administrative. Ses avocats – qui travaillent pour l’organisation de défense des droits humains Addameer – ont expliqué que lorsqu’il a entamé cette grève, les Services pénitentiaires israéliens l’ont placé à l’isolement et lui ont refusé du sel à mettre dans l’eau, visiblement pour le punir.
Sa femme Lamees a dit à Amnesty International n’avoir pu lui rendre visite qu’une seule fois, en avril, avant qu’il cesse de s’alimenter. Depuis, la famille de cet homme se voit empêcher de le voir. L’épouse d’Abdul Razeq Farraj a ajouté que celui-ci n’avait pas le droit de consulter un avocat ou des médecins indépendants, et qu’il lui était donc très difficile d’obtenir des informations concernant l’endroit où il se trouve et son état de santé.
ACTION RECOMMANDEE : lettre international / email / fax :
– appelez les autorités israéliennes à libérer immédiatement Abdul Razeq Farraj et tous les autres Palestiniens en détention administrative, à moins qu’ils soient rapidement inculpés d’infractions reconnues par le droit international ;
– engagez-les à veiller à ce qu’Abdul Razeq Farraj et les autres détenus administratifs menant une grève de la faim aient constamment accès aux médecins de leur choix et reçoivent tous les soins médicaux spécialisés nécessaires, qui doivent leur être prodigués avec leur consentement éclairé. Les autorités ne doivent pas faire pression sur les professionnels de la santé pour qu’ils traitent les détenus d’une manière contraire à leur éthique ;
– exhortez-les à s’assurer qu’Abdul Razeq Farraj et les autres grévistes de la faim soient toujours traités humainement et avec dignité, aient librement accès à leurs avocats et leurs familles, et ne fassent pas l’objet de sanctions en raison de leur grève.
MERCI D’ENVOYER VOS APPELS AVANT LE 25 JUILLET 2014 À :
Premier ministre
Benjamin Netanyahu
Office of the Prime Minister
3 Kaplan St., PO Box 187
Kiryat Ben-Gurion, Jerusalem 91950, Israël
Courriel : b.netanyahu@pmo.gov.il ou pm_eng@pmo.gov.il
Formule d’appel : Monsieur le Premier ministre,
Commissaire des Services pénitentiaires israéliens, Lieutenant-General Aharon Franco
Israel Prison Service, PO Box 81
Ramleh 72100, Israël
Fax : +972 8 919 3800
Formule d’appel : Monsieur,
Copies à :
Directeur général, ministère de la Santé, Roni Gamzo
Ministry of Health
2 Ben Tabai Street
Jerusalem 93591, Israël Fax : +972 2 565 5966
Ambassade d’Israël
3 rue Rabelais - 75008 Paris
Tél : 01 40 76 55 00 - Fax : 01 40 76 55 55
Courriel : information@paris.mfa.gov.il
Tarifs postaux pour Israël :
Lettre internationale (20 g) : 0.98 €
COMPLÉMENT D’INFORMATION
Abdul Razeq Farraj, 51 ans, père de deux enfants, est le directeur des finances et de l’administration de l’Union des Comités de travailleurs agricoles, basée à Ramallah, où il travaille depuis 28 ans. Il possède une licence d’économie et un diplôme de gestion, obtenus à l’université de Bir Zeit, dans les TPO.
De 1985 à 1991, il a purgé une peine de prison de six ans à laquelle il a été condamné par un tribunal israélien. Depuis sa remise en liberté, il a été arrêté et placé en détention administrative cinq fois : du 30 mai 1994 au 1er février 1996, du 9 avril 2002 au 28 juillet 2006, du 12 janvier au 9 octobre 2009, du 27 novembre 2011 au 20 juillet 2012, et plus récemment, depuis le 25 février 2014. Au total, il a passé plus de 92 mois en détention sans inculpation ni jugement.
En 2012, il a mené une grève de la faim pendant environ 24 jours pour protester contre ses conditions de détention, en même temps que d’autres détenus administratifs. À cette époque, quelque 2 000 prisonniers palestiniens ont entamé une grève de la faim collective pour protester contre les mauvaises conditions carcérales, y compris les placements à l’isolement, le fait de ne pas pouvoir voir leurs familles et les détentions sans inculpation. Ce mouvement s’est terminé le 14 mai 2012, à la suite d’un accord conclu avec les autorités israéliennes sous médiation égyptienne. Selon certains médias, Israël avait accepté de ne pas reconduire les ordres de détention administrative en vigueur, à moins que de nouveaux renseignements d’importance ne soient révélés. Les autorités israéliennes ont pourtant continué d’émettre et de renouveler de tels ordres. Selon les Services pénitentiaires israéliens, 191 Palestiniens étaient en détention administrative au 30 avril 2014 mais il est possible que ce nombre ait augmenté depuis. Neuf membres du Conseil législatif palestinien sont actuellement en détention administrative.
Le 24 avril dernier, environ 125 détenus administratifs ont annoncé qu’ils entamaient une grève de la faim pour protester contre leur incarcération. Selon plusieurs avocats et organisations défendant les droits humains, les autorités israéliennes punissent ces personnes, notamment en les plaçant à l’isolement, en leur refusant du sel à mettre dans l’eau, et en les empêchant de recevoir la visite de leurs avocats et de leurs familles, et de consulter des médecins indépendants. Selon Addameer, Abdul Razeq Farraj et une quarantaine d’autres détenus administratifs ont été admis dans différents hôpitaux le 28 mai dernier, et sont fréquemment transférés des hôpitaux vers la prison et vice-versa depuis, ce qui semble être une nouvelle forme de sanction. L’organisation Médecins pour les droits humains-Israël a confirmé que ses membres et d’autres professionnels de la santé n’avaient pas accès à ces personnes. Elle a demandé aux Services pénitentiaires israéliens la permission de rendre visite à Abdul Razeq Farraj et attend leur réponse. Les membres du personnel d’Addameer, qui fournit des conseils et une représentation juridiques, n’ont pas non plus l’autorisation de voir ces détenus, y compris Abdul Razeq Farraj.
Amnesty International s’oppose à la détention administrative en Israël et dans les TPO car elle constitue une violation du droit à un procès équitable, reconnu à l’échelon international. Les individus qui en font l’objet doivent être relâchés, à moins qu’ils soient rapidement inculpés d’infractions pénales prévues par la loi et jugés conformément aux normes internationales d’équité. Amnesty International pense que certains individus en détention administrative aux mains des autorités israéliennes sont probablement des prisonniers d’opinion, incarcérés seulement pour avoir exercé de façon pacifique leur droit à la liberté d’expression et d’association. Toutes les prisons israéliennes dans lesquelles les détenus administratifs palestiniens sont incarcérés, sauf une, sont situées sur le territoire israélien. La détention en Israël de Palestiniens originaires des TPO constitue une violation du droit international.
Le 9 juin dernier, un projet de loi du gouvernement qui permettrait de nourrir de force les détenus et prisonniers en grève de la faim a été adopté à l’issue de la première lecture devant le Knesset (parlement). Dans sa version actuelle, ce texte autoriserait le directeur des Services pénitentiaires israéliens à procéder à l’alimentation de force s’il en reçoit la permission par un tribunal de district. Ce projet de loi doit encore être examiné deux fois avant de pouvoir être promulgué le 20 juin prochain.
Toute décision concernant l’alimentation non consentie d’un gréviste de la faim doit être prise uniquement par des professionnels de la santé qualifiés. L’éthique médicale exclut cette pratique dans le cas de grévistes de la faim mentalement aptes. Une décision médicale en la matière doit tenir compte des facultés mentales et des souhaits des intéressés, évalués par des professionnels de la santé lors de consultations confidentielles. Les autorités ne doivent jamais faire pression sur ces derniers pour les forcer à agir d’une manière contraire à leur éthique.
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