Plateforme des ONG Françaises pour la Palestine

Donner au droit au retour des Palestiniens sa dimension politique est impératif

18 octobre 2018 - Ramona Wadi, Chronique de Palestine

Dans son rapport annuel au Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a recommandé qu’Israël reconnaisse la Nakba palestinienne. La toile de fond d’une telle reconnaissance reste le compromis à deux états, qui va à l’encontre de l’objectif de la recommandation.



Cette reconnaissance, selon le rapport, est « une condition nécessaire pour une paix viable et durable ». Le Comité a également recommandé que « les réfugiés palestiniens soient traités comme des ressortissants dépossédés d’un pays – la Palestine – plutôt que comme des réfugiés apatrides « . Elle réfute l’idée selon laquelle la colonisation est qualifiée de « conflit », déclarant : « Il ne s’agit pas d’un conflit entre deux parties se disputant un territoire. Il s’agit d’un état qui occupe, colonise et annexe le territoire d’un autre état. »

La terminologie se démarque des platitudes habituelles utilisées par les institutions onusiennes. Toutefois, la possibilité de manipuler les droits des Palestiniens existe toujours en raison de l’adhésion du Comité au paradigme des deux États. Il ne suffit pas d’adopter une position contre les efforts israéliens et américains visant à modifier, au point de ne plus les reconnaître, le statut des réfugiés palestiniens et leur droit légitime au retour si le Comité ne formule pas une autre solution qui s’inspire complètement des récits palestiniens.

Le scénario à deux États a été dénoncé comme étant une arnaque visant à faciliter la colonisation du territoire palestinien par Israël et à créer une population perpétuellement déplacée, à tel point que le droit au retour des Palestiniens doit être lu et interprété en relation avec le déplacement en cours. Dans la mémoire des Palestiniens, la Nakba ne se limite pas à 1948, parce que le nettoyage ethnique de la Palestine par Israël n’a jamais cessé.

Comme la communauté internationale se dérobe et n’exerce pas d’opposition au colonialisme et à l’obsession démographique d’Israël, elle consent à l’expulsion des Palestiniens de leur territoire par Israël. Loin de promouvoir l’importance de la reconnaissance de la Nakba, la communauté internationale l’appuie en permettant à Israël d’exister selon ses propres conditions, tandis que les Palestiniens sont constamment contraints de modifier leur existence pour accueillir une puissance coloniale sur leur territoire.

La dénégation de la Nakba par Israël est ancrée dans ses récits fabriqués, imposés à la communauté internationale et diffusés de telle manière que les récits palestiniens, malgré leurs racines légitimes, sont forcés de se battre pour exister et obtenir une reconnaissance internationale, sans parler d’approbation.

L’obsession de la communauté internationale pour une commémoration dissociée va à l’encontre de ses prétendues obligations en matière de droits de l’homme. C’est aussi faire insulte à la mémoire des Palestiniens que de concentrer leur histoire autour de jours précis du souvenir, alors que l’on permet à Israël chaque jour de l’année depuis 1948 de faire progresser sa colonisation du territoire palestinien, sans parler du colonialisme de peuplement qui avait précédé et facilité la création de l’État.

La reconnaissance internationale de la Nakba palestinienne comme traumatisme permanent dans la mémoire collective de la Palestine marginaliserait les efforts d’Israël pour la faire tomber dans l’oublie. Cependant, cette mesure ne peut être mise en œuvre dans le cadre des deux états, car ce dernier continue d’approuver la légitimité de l’existence coloniale d’Israël, tout en présentant un hypothétique état palestinien dépendant, voire dysfonctionnel, en termes d’autodétermination et dans l’impossibilité de réaliser sa libération nationale.

Il est donc impératif de donner au droit au retour des Palestiniens sa dimension politique. Dans l’état actuel des choses, la communauté internationale continue d’entretenir l’illusion que le compromis à deux États constitue la seule solution politique, tandis que le droit au retour est présenté à tort dans son intégralité comme une compensation. C’est pourquoi les Palestiniens doivent définir leur propre droit au retour, même s’il va à l’encontre de ce que voudrait imposer la communauté internationale.

Ramona Wadi est rédactrice au Middle East Monitor où cet article a été publié en premier. Elle contribue régulièrement au PalestineChronicle.com.


Sur le site de Chronique de Palestine

Visuel : Réfugiés palestiniens en quête de sécurité après avoir été expulsés de leur pays d’origine. (Photo : File)




Partager / imprimer
Bouton Facebook Bouton Twitter Bouton PDF Bouton imprimer

Rechercher par thématique
Réfugiés palestiniens Diplomatie Droit au retour

Rechercher par type de ressources
article


Articles associés

21 octobre 2024
[Edition spéciale] Gaza, une guerre de l’information
Analyses politiques et géopolitiques Promotion de la paix et de la non violence La question palestinienne en France Entreprises et droits humains Cour Pénale Internationale Solidarité internationale Défenseur.e des droits de l’Homme Torture et mauvais traitements Histoire/analyse politique Economie et développement Détention administrative Prisonniers palestiniens Positions officielles de la France Aide internationale Liberté d’expression Diplomatie Impunité Crime de guerre Colonisation Bande de Gaza Commerce solidaire Hamas Droit international Apartheid Médias Journalisme
8 octobre 2024
En Palestine et au Liban, Israël sème la désolation
La question palestinienne en France Promotion de la paix et de la non violence Analyses politiques et géopolitiques Entreprises et droits humains Société (Palestine/Israël) Solidarité internationale Défenseur.e des droits de l’Homme Histoire/analyse politique Cour Pénale Internationale Torture et mauvais traitements Santé UE/Israël Guerre Hamas Economie UE/Palestine Diplomatie Apartheid Bande de Gaza Colonisation Etat de Palestine Crime de guerre Criminalisation Droit international Occupation/annexion Violence des colons Politique française Aide internationale Réfugiés palestiniens
6 septembre 2024
Les crimes de guerres se multiplient en Palestine occupée
Bande de Gaza Flottille pour Gaza Analyses politiques et géopolitiques La question palestinienne en France Défenseur.e des droits de l’Homme Cour Pénale Internationale Société (Palestine/Israël) Solidarité internationale Economie et développement Promotion de la paix et de la non violence Histoire/analyse politique Entreprises et droits humains Torture et mauvais traitements Autorité palestinienne Réfugiés palestiniens Palestiniens d’Israël Droit international Violence des colons Aide internationale Apartheid Handicap Hamas Armement Société civile Nations unies

Campagne en cours


L’agenda

Dernières publications

11 décembre 2024 Rapport Amnesty International « On a l’impression d’être des sous-humains » - Le génocide des Palestiniens et Palestiniennes commis par Israël à Gaza »

10 décembre 2024 Déclaration : Tous les États parties au Statut de Rome doivent coopérer pleinement avec la CPI dans l’exécution des mandats d’arrêt Cour Pénale Internationale Impunité Société (Palestine/Israël) Bande de Gaza Crime de guerre Guerre

10 décembre 2024 Communiqué - Émission des mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) Cour Pénale Internationale Impunité Société (Palestine/Israël)


> Toutes les publications