Le vernis démocratique du régime sioniste n’en finit plus de craquer. Les droits des Palestinien-ne-s d’Israël sont, une fois de plus, sacrifiés au nom de la défense de la majorité juive et de ses privilèges. En manipulant savamment la psychose qui hystérise tous les États racistes et colonialistes – la perte du contrôle qu’engendrerait une égalité pleine et entière –, les élites politiques sionistes ont enfanté un monstre : le projet de loi « État-nation », porté par la ministre de la justice Ayelet Shaked.
La ministre, qui appelait il n’y pas si longtemps au génocide des Palestinien-ne-s et avec laquelle Manuel Valls posait si fièrement, n’y est pas allée par quatre chemins : « Le caractère juif de l’État d’Israël doit être maintenu, quitte à ce que ce soit au détriment de l’égalité (…) Israël est un État juif, ce n’est pas l’État de toutes ses nations » [1]. Les mots sont lâchés. Les Palestinien-ne-s d’Israël, 20% de la population du pays, doivent embrasser le caractère juif de l’État – et donc leur condition de citoyen de seconde zone – ou partir.
Le processus de dépossession des Palestinien-ne-s n’est pas nouveau. Il est indissociable de la création de l’État d’Israël, en mai 1948, qui déboucha sur l’exil forcé de 750 000 Palestinien-ne-s (la Nakba), l’instauration d’un régime militaire régissant les moindres faits et gestes de celles et ceux qui purent rester sur leur terre jusqu’en 1966. Suivra un système sophistiqué de discriminations pénalisant notamment leur accès au travail, au logement et la gestion de leurs terres, ainsi que le nettoyage ethnique des communautés bédouines du Neguev/Naqab – le tout ponctué de régulières et sanglantes vagues de répression (Kafr Kassen en 1956 et la Journée de la terre en 1976 notamment).
En faisant d’Israël « le foyer national du peuple juif » et non pas l’État de tous ses citoyen-ne-s, le projet de loi va encore plus loin, enterrant tout faux semblant quant à sa nature soi-disant démocratique. Il constitutionnalise, renforce et verrouille les politiques d’apartheid inhérentes au projet sioniste, ouvrant la voie à la possibilité d’un nouveau chapitre de la dépossession : celle des droits politiques des Palestinien-ne-s d’Israël. Car s’ils disposent encore du droit de vote en tant que citoyens de nationalité « arabe », qu’en sera-t-il demain dans un État encore plus « nationalement » juif ?
Nous, à l’UJFP, ne considérerons jamais l’État d’Israël comme le foyer national du peuple juif, précisément parce que notre boussole politique reste, aujourd’hui plus que jamais, celle de l’égalité civique et politique, ici comme là-bas. Ce projet de loi pousse encore plus loin la conviction ancienne que les antisémites partagent avec les sionistes : les Juifs seraient des étrangers dans leur propre pays et devraient tout quitter pour s’installer en Israël/Palestine. Il favorise ainsi l’antisémitisme et les met volontairement en danger. A celles et ceux qui céderont au chant des sirènes nationalistes et à son narcissisme identitaire, nous ne pouvons que rappeler qu’ils sont les tartuffes d’un régime qui, tout en confisquant toujours un peu plus les identités juives en les assimilant au sionisme, noue des relations étroites avec les extrêmes-droites européennes et les mouvements suprématistes blancs aux États-Unis.
Le Bureau national de l’UJFP, le 14 février 2018
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