Alors que les Israéliens sont appelés à élire un nouveau Parlement le 17 septembre, la bande de Gaza n’en finit pas de sombrer. Depuis treize ans, Tel-Aviv soumet le territoire palestinien dirigé par le Hamas à un blocus militaire dévastateur. Combien de temps la population pourra-t-elle tenir ?
En cette matinée de juin, le temps est radieux sur la plage où s’alignent les barques de pêche bariolées. L’éclat du soleil, le bleu du ciel et le ressac de la mer donnent au panorama des airs de carte postale. Mais ce charmant décor ne fait pas longtemps illusion : ici, la Méditerranée est polluée, l’horizon obturé par les frégates de guerre, les cieux sillonnés par les avions de chasse et les drones. Nous sommes dans la bande de Gaza, un territoire surpeuplé (2 millions d’habitants sur 365 kilomètres carrés) et assiégé par Israël.
Les pêcheurs qui nous accueillent dans leur cahute à Beit Lahya, aux abords de la ville de Gaza, font grise mine. Israël, qui impose depuis treize ans un implacable blocus — aérien, maritime et terrestre — à la langue de terre palestinienne, leur interdit depuis deux jours toute sortie en mer, après avoir déjà réduit comme peau de chagrin leur aire de navigation. La raison invoquée : l’envoi de ballons et de cerfs-volants incendiaires sur les localités israéliennes — principalement des kibboutzim — situées à la lisière terrestre de la bande côtière. Le 18 juin, après deux nuits d’hostilités, puis un retour au « calme », Tel-Aviv réautorisera la pêche, mais seulement dans la limite de dix milles marins (dix-huit kilomètres et demi), loin des eaux riches en poissons. Une mesure d’exception dont le Hamas, le parti islamiste au pouvoir depuis 2006 à Gaza, réclame régulièrement la levée lors des négociations indirectes avec Israël.
« Les navires de patrouille israéliens sont à trois ou quatre kilomètres à peine, vous pouvez les voir à l’œil nu, nous dit M. Jihad Al-Sultan, le responsable du comité syndical des pêcheurs du nord de la bande de Gaza, en montrant le large du doigt. Quand nos pêcheurs sont en mer, ils leur tirent dessus régulièrement, le plus souvent sans sommation. Récemment, plusieurs d’entre eux ont été blessés et leurs embarcations sérieusement endommagées. » Au cours du premier semestre 2019, les forces navales israéliennes ont ouvert le feu à plus de (...)
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Olivier Pironet
Voir aussi :
(1) Tzvi Joffre, « IAF attacks targets in Gaza strip after rocket fire », The Jerusalem Post, et « Israeli air force fires many missiles into Gaza », International Middle East Media Center (IMEMC), 14 juin 2019.
(2) Cf. le rapport annuel du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (Unocha), New York, mai 2018, et Ali Adam, « Israel is intensifying its war on Gaza’s farmers », The New Arab, Londres, 19 mars 2018.
(3) Tom Miles, « UN bemoans unsustainable Palestinian economy », Reuters, 12 septembre 2018.
(4) Cf. le rapport « Gaza in 2020 : A liveable place ? », Nations unies, New York, août 2012.
(5) « Gaza ten years later », Nations unies, juillet 2017.
(6) Toutes ces données sont disponibles sur les sites de la Banque mondiale, de la Cnuced et du Bureau central des statistiques palestinien (PCBS).
(7) « Rapport sur l’assistance de la Cnuced au peuple palestinien », Cnuced, Genève, 12 septembre 2018.
(8) Lire Akram Belkaïd, « Al-Nakba », dans « Palestine. Un peuple, une colonisation », Manière de voir, no 157, février-mars 2018.
(9) « Gaza : des enquêteurs de l’ONU suspectent Israël de crimes contre l’humanité lors des manifestations », ONU Info, 28 février 2019.
(10) Tovah Lazaroff, « Netanyahu : UN set new hypocrisy record with Israeli war crimes allegation », The Jerusalem Post, 28 février 2019.
(11) Cf. « The peace index », 2 mai 2018.
(12) Plus de quatre-vingt-dix Palestiniens, dont vingt-huit enfants et quatre secouristes, seront blessés ce jour-là dans la bande de Gaza.
(13) Entsar Abu Jahal, « Human rights group documents Hamas abuses », Al-Monitor, 26 avril 2019.
(14) Sur la coopération sécuritaire, lire « En Cisjordanie, le spectre de l’Intifada », Le Monde diplomatique, octobre 2014.
Visuel : Amer Nasser. – Camp de réfugiés de Nahr Al-Bared, Khan Younès, bande de Gaza, mars 2019
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