Plateforme des ONG Françaises pour la Palestine

La mise en œuvre de l’étiquetage des produits des colonies

12 février 2016 - Courrier à la Direction Générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Paris, le 12 février 2016

Objet : Mise en œuvre de l’étiquetage différencié des produits des colonies israéliennes en application de la notice interprétative (2015/C 375/05) de la Commission européenne

Madame la Directrice Générale de la DGCCRF,

Le 11 novembre 2015, la Commission européenne a publié une notice interprétative sur l’indication de l’origine des produits des territoires occupés par Israël depuis juin 1967, venant clarifier la législation commerciale européenne existante.

La Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, la FIDH, Attac France et le Réseau Euromed France, réunis au sein de la campagne « Made in Illegality », ont positivement accueilli cette annonce qui correspond à l’une de leurs demandes [1].

Cette notice interprétative rappelle en premier lieu, en accord avec le droit international, que les territoires occupés par Israël (le plateau du Golan, la Cisjordanie dont Jérusalem-Est et la bande de Gaza) ne font pas partie du territoire israélien.
Ensuite, selon la législation européenne existante, il est obligatoire que certains produits disponibles sur le marché européen (cosmétiques, fruits et légumes frais, vin, huile d’olive) aient une mention indiquant leur provenance exacte. D’autres peuvent être étiquetés sur la base du volontariat. Dans tous les cas, la Commission précise que les produits provenant des colonies dans les territoires occupés par Israël ne pourront être étiquetés « produit d’Israël », mais devront avoir une mention du type « produit de Cisjordanie/du Golan (colonie israélienne) ».

La Commission en appelle aux opérateurs économiques qui ont de nombreux moyens de se procurer l’origine exacte des produits ; et rappelle que si l’origine est difficilement identifiable, l’opérateur économique peut demander la provenance exacte du produit au fournisseur ou à l’importateur. Déterminer la provenance exacte des produits fait partie de la responsabilité incombant aux entreprises d’exercer une diligence raisonnable en matière de droits humains, tel que reconnu dans les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales.

D’autre part, la Commission rappelle qu’il est de la responsabilité des Etats membres de l’UE de mettre en place ces dispositions au niveau national et de prévoir des sanctions si la législation européenne n’est pas appliquée.
En Grande-Bretagne et au Danemark, les gouvernements ont déjà adopté des directives recommandant aux distributeurs un étiquetage différencié afin de distinguer les produits issus des colonies de ceux issus de l’État israélien.

Maintenant que la disposition est claire, nous attendons de notre gouvernement une mise en œuvre rapide de ces dispositions en France, comme la notice explicative le prescrit afin que les opérateurs économiques français respectent sur ce point la législation commerciale européenne.

Nous, organisations regroupées au sein de la campagne « Made in Illegality », avons ainsi sollicité à deux reprises le ministre de l’Economie et la secrétaire d’Etat chargée du Commerce, de l’Artisanat, de la Consommation et de l’Economie sociale et solidaire, Martine Pinville, dont la DGCCRF dépend, afin d’obtenir des informations sur la mise en œuvre de la législation européenne. Celle-ci s’est contentée de transmettre notre demande au Ministère des Affaires étrangères, qui a également ignoré nos courriers.

Parallèlement, plusieurs enseignes de la grande distribution, confrontées aux actions citoyennes, vous ont également sollicitée à plusieurs reprises pour obtenir des instructions précises sur l’étiquetage des produits des colonies. Leurs demandes sont également restées sans réponse.

Selon l’article 2 du Décret n°2001-1178 du 12 décembre 2001 détaillant les attributions de la DGCCRF, celle-ci « élabore des projets de texte législatifs et des textes réglementaires relatifs à l’information des consommateurs […], en assure la mise en œuvre et en contrôle l’application ». Selon le même article, la DGCCRF élabore également des projets de textes législatifs et réglementaires relatifs à la certification des produits offerts sur le marché.

La mise en œuvre et le contrôle de l’application de l’étiquetage différencié des produits provenant des colonies israéliennes revient donc à la DGCCRF.

Nous souhaitons savoir quelles mesures concrètes ont été ou seront prises par vos services afin de s’assurer que la législation française soit en accord avec la législation européenne, maintenant que celle-ci est claire. Nos organisations recommandent d’élaborer un texte législatif ou réglementaire robuste et ambitieux, qui oblige à utiliser l’indication « (colonie israélienne) » dans l’origine du produit, en conformité avec la note interprétative (2015/C 375/05) de la Commission Européenne. Cette expression doit être utilisée pour l’étiquetage des produits fabriqués en partie ou en totalité dans les colonies. Une telle mention est un minimum, le commerce des produits issus des colonies ayant pour effet de perpétuer l’occupation et la colonisation du Territoire palestinien occupé, reconnue illégale en droit international et par de nombreux Etats dont la France.

Nos organisations recommandent par ailleurs d’ajouter à la mention « colonie israélienne » l’expression « Territoire palestinien occupé » ou le cas échéant « Plateau du Golan occupé » dans l’origine des produits. Une telle mention est conforme aux positions et aux engagements de l’Union Européenne et la France, en conformité avec le droit international, relativement à la non-reconnaissance, de la souveraineté d’Israël sur les territoires qu’il occupe depuis le mois de juin 1967.
Nous souhaiterions également vous interroger sur les mesures qui seront prises pour s’assurer de la mise en œuvre de ce texte et en contrôler l’application, y compris les sanctions qui seront mises en place en cas de non-application.

Afin d’éclaircir les points évoqués ci-dessus, nous souhaiterions nous entretenir avec vous.

Dans l’attente de la suite que vous donnerez à notre requête, basée sur notre constante exigence du droit, nous vous prions d’agréer, Madame la Directrice Générale, l’expression de notre haute considération.

Claude Léostic, Présidente de la Plateforme des ONG Françaises pour la Palestine
Karim Lahidji, Président de la Fédération Internationales des Droits de l’Homme
Nacer El Idrissi, Président du Réseau Euromed France
Attac France

Lire la réponse de la DGCCRF :
page 1
page 2


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