Paris, le 19 juin 2017
Monsieur le Président,
Dans la bande de Gaza, sous blocus israélien depuis 10 ans, on s’achemine vers une catastrophe humanitaire.
Comme vous le savez certainement, la bande de Gaza est sous blocus militaire aérien, terrestre et naval depuis 10 ans exactement ; selon le droit international, une punition collective pour la population civile palestinienne qui y vit. La population subit également des attaques militaires israéliennes répétées depuis 2008. La dernière, à l’été 2014, a été la plus destructrice et ses conséquences humaines et humanitaires affectent encore les Gazaoui.e.s puisque fin 2016, près d’un tiers des maisons entièrement détruites n’étaient toujours pas reconstruites et plus de 47 000 personnes étaient toujours sans abri.
La responsabilité en incombe à Israël, puissance occupante qui, au lieu de fournir assistance à la population occupée comme l’y oblige le droit international, empêche l’entrée des matériaux indispensables non seulement au bien-être mais à la vie des Palestiniens de Gaza. La centrale électrique, bombardée à plusieurs reprises par l’armée israélienne, ne peut fonctionner pleinement et dans tous les cas ne peut fournir ce qui est nécessaire à Gaza (environ 400 mégawatts). La population, captive, est contrainte de recourir à l’apport extérieur. Israël livrait environ 30% des besoins totaux d’électricité de la bande de Gaza pour 40 millions de shekels mensuels, somme soustraite des taxes palestiniennes qu’Israël perçoit en lieu et place de l’Autorité palestinienne à qui il est supposé les reverser.
Lundi 12 juin, le ministre israélien de la Sécurité intérieure a confirmé qu’Israël couperait l’approvisionnement d’électricité à Gaza de 40%, après que l’Autorité palestinienne a décidé de ne pas payer cette partie de la facture, qui incombe selon elle aux autorités qui dirigent Gaza (c’est officiellement l’Autorité palestinienne qui, dans le cadre des Accords d’Oslo, assume l’ensemble des charges du territoire occupé, dont l’énergie).
Soumis déjà à des coupures récurrentes depuis plusieurs années, les deux millions de femmes, hommes et enfants de Gaza n’auront désormais plus que deux heures d’électricité par jour. Actuellement, de larges unités des hôpitaux ont été forcées de fermer à cause du manque d’électricité et le ministère de la Santé a annoncé le report sine die d’au moins un tiers des opérations ; l’approvisionnement en eau est également impacté puisque les usines de désalinisation ne peuvent fonctionner sans courant. Les foyers ne reçoivent de l’eau que par intermittence, l’irrigation des cultures ne fonctionne plus et les eaux usées ne peuvent être pompées hors des zones résidentielles. Les générateurs pouvant pallier partiellement à la pénurie d’électricité sont surexploités, en manque de carburant, et arrivent au bout de leurs capacités.
Cette réduction supplémentaire d’électricité est une nouvelle punition collective pour la population civile de Gaza et aura non seulement pour conséquence l’aggravation catastrophique de la crise humanitaire, mais également des tensions dans le territoire assiégé. L’association israélienne Gisha, qui défend la liberté de circulation, a elle-même annoncé dans un courrier au Ministère de la Défense, que « réduire la fourniture d’électricité à Gaza est une ligne rouge qui ne doit pas être franchie » alors que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et le Bureau des Nations unies pour la coordination des Affaires humanitaires (OCHA) redoutent une crise totale.
Nous vous demandons d’intervenir au plus vite auprès des autorités israéliennes, qui ont la main mise sur l’électricité apportée aux Palestiniens de Gaza et portent la responsabilité du blocus, afin qu’elles livrent l’électricité au niveau - déjà très insuffisant - précédent.
Nous savons les enjeux politiques internes et les contraintes multiples, notamment financières, qui pèsent sur l’Autorité palestinienne, et vous demandons instamment d’intervenir pour qu’une aide d’urgence lui soit apportée, afin qu’elle paie à Israël la quote-part de la facture d’électricité concernant la bande de Gaza pour qu’elle ne soit pas plongée dans le noir.
Cette mesure immédiate ne résoudra pas la question de fond qui est la poursuite du blocus illégal et cruel de Gaza, et nous vous demandons que la France se mobilise pleinement pour qu’il y soit mis fin, en application du droit international dont elle est garante.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération.
Claude Léostic, Présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
Cette lettre a également été envoyée au Ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.
crédits photo : UN Photo Shareef Sarhan - 29 July 2014
Campagne en cours