Paris, le 28 juillet 2017
Extrêmement préoccupés par la situation à Jérusalem ces deux dernières semaines, nous souhaitons vous rappeler la nécessité de rester vigilant.
Ce 25 juillet 2017, le gouvernement israélien a décidé de retirer les portiques détecteurs de métaux installés le 16 juillet 2017 à l’entrée de l’Esplanade des Mosquées, dont l’installation, véritable obstacle à la liberté de déplacement et de culte, avait déclenché la protestation des Palestiniens, très violemment réprimée. Le 27 juillet, il s’est résolu à retirer les autres mesures dites « de sécurité » dont des barrières et des caméras.
Ces mesures représentaient de nouveaux instruments de l’occupation israélienne à Jérusalem. Non seulement elles menaçaient le fragile statu quo du troisième lieu saint de l’Islam, établi en 1967, qui octroie la gestion de l’Esplanade au Waqf jordanien, mais elles étaient surtout un moyen supplémentaire pour resserrer le contrôle de la population palestinienne à Jérusalem. Ce à quoi les Palestiniens ont répondu par une désobéissance civile majeure.
Si les autorités religieuses musulmanes ont appelé au retour à la prière sur l’Esplanade, on ne peut considérer la situation comme « rentrée dans l’ordre » ou apaisée. La violence avec laquelle la police israélienne a dispersé la foule, qui entrait pacifiquement sur l’Esplanade pour la première fois depuis 13 jours le 27 juillet, en témoigne.
L’occupation et la colonisation israéliennes de Jérusalem-Est demeurent. Depuis l’annexion illégale de Jérusalem par Israël en 1967, le statut des Palestiniens de Jérusalem-Est est extrêmement précaire, chacun est menacé de voir sa maison démolie ou confisquée par des colons, son permis de résidence révoqué, risquant l’expulsion et l’apatridie. Bien que la population soit soumise aux taxes israéliennes, les infrastructures de la partie Est de Jérusalem sont délaissées et la situation économique y est désastreuse.
L’installation de portiques ou des caméras n’était donc pas une question de sécurité mais elle représentait une nouvelle mesure d’humiliation et de harcèlement, menant sur le long terme à une expulsion lente et insidieuse des Palestiniens de la ville ; à l’image de l’expulsion des Palestiniens de la vieille ville d’Hébron.
Le gouvernement israélien ne cache effectivement pas sa volonté de conserver dans la municipalité de Jérusalem une population à majorité juive israélienne aux dépens de la population palestinienne. Il vient à ces fins de proposer un projet de loi à la Knesset qui redéfinirait les frontières de la municipalité de Jérusalem. La loi priverait ainsi du statut de résident à Jérusalem les habitants palestiniens de quartiers situés dans les frontières de la municipalité (fixées par Israël) mais au-delà du Mur, tels que le camp de réfugiés de Shuafat et le village de Kafr Aqab (soit près de 140 000 personnes). Le projet a été approuvé à la Knesset en lecture préliminaire et il devrait passer en première lecture à tout moment.
Selon le texte proposé, si ces quartiers ne seraient plus officiellement sous la municipalité de Jérusalem, ils resteraient sous souveraineté israélienne (sans préciser laquelle, comment etc.). Cela créerait un précédent extrêmement dangereux sur d’autres quartiers palestiniens situés en Cisjordanie et ouvrirait davantage la voie à l’annexion de la Cisjordanie par Israël.
La France, qui a réitéré son attachement au statu quo, qui est à l’origine – avec l’Egypte et la Suède – de la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU du 24 juillet, et qui ne cesse de défendre la solution à deux Etats, doit poursuivre son rôle de garante du droit international.
Nous attendons de vous, Monsieur le Président, une réaction ferme face aux autorités israéliennes et une opposition officielle à ce projet de loi.
Nous vous demandons d’exiger du gouvernement israélien le respect du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’Homme et, dans ce but, demander :
– la levée des différentes restrictions imposées par Israël aux Palestiniens à Jérusalem-Est ;
– l’arrêt des modifications du statut de Jérusalem-Est tel que défini par la communauté internationale. Ceci inclue l’arrêt de la colonisation et de l’acquisition de territoire par la force ou encore l’abandon de toute remise en cause du statu quo des lieux saints. Dans cette optique, la France serait également à même d’exiger la réouverture de la Maison d’Orient, seule institution politique palestinienne à Jérusalem.
En espérant que vous donnerez suite à notre requête, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’assurance de notre profonde considération.
Claude Léostic, Présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine
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